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Les plus anciens réacteurs nucléaires prolongés de dix ans

Les 32 réacteurs de 900 mégawatts d’EDF sont les plus anciens en fonctionnement en France. Ils avaient été initialement conçus pour fonctionner quarante ans.

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Publié le 25 février 2021 à 09h36, modifié le 25 février 2021 à 17h33

Temps de Lecture 3 min.

C’est une décision qui ouvre, officiellement, la voie à la prolongation de la durée de vie des réacteurs les plus anciens du parc nucléaire français au-delà de quarante ans. Dans un avis publié jeudi 25 février, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) considère que « l’ensemble des dispositions prévues ouvrent la perspective » d’une poursuite de l’activité des 32 réacteurs de 900 mégawatts (MW) français pour une période de dix ans. Si la réglementation française ne prévoit pas de « durée de vie » maximale des réacteurs, une hypothèse de quarante ans de fonctionnement avait été retenue lors de leur conception.

« Dans cet avis, nous disons deux choses, précise Julien Collet, le directeur général adjoint de l’ASN. Nous affirmons que cette prolongation est possible et nous fixons les conditions selon lesquelles elle est possible. Un certain nombre de travaux et de contrôles doivent être menés, qui sont ici prescrits et imposés par l’ASN. »

Réexamen au cas par cas

Cet avis générique du gendarme du nucléaire, publié au terme d’une instruction entamée en 2013, porte sur les installations communes à tous les réacteurs de 900 MW, situés dans huit centrales – Bugey (Ain), Blayais (Gironde), Chinon (Indre-et-Loire), Cruas (Ardèche), Dampierre (Loiret), Gravelines (Nord), Saint-Laurent (Loir-et-Cher) et Tricastin (Drôme). Mis en service à partir de la fin des années 1970 et dans les années 1980, ils sont en grande partie identiques, ayant été construits sur un modèle similaire. Un réexamen au cas par cas sera ensuite mené lors des visites décennales – qui ont débuté en 2019 et doivent se poursuivre jusqu’en 2031 – pour prendre en compte les spécificités de chaque réacteur et des sites sur lesquels ils se trouvent.

Parmi les principaux travaux prescrits à EDF, qui exploite les centrales, une partie vise à réduire les conséquences des accidents les plus graves avec fusion du cœur du réacteur. La dalle de béton des enceintes de confinement doit ainsi être épaissie pour éviter la pollution des nappes phréatiques. D’autres travaux ont pour objectif de renforcer la protection des installations face à des phénomènes peu pris en compte il y a quarante ans, tels que les séismes, les canicules ou les sécheresses. Enfin, la protection des « piscines » de refroidissement, où sont entreposés les combustibles usés, doit être renforcée. Le gendarme du nucléaire appelle notamment à la mise en œuvre d’un « système de refroidissement diversifié ».

Dans son avis, l’ASN établit également un calendrier précis pour l’accomplissement de ces améliorations de sûreté, d’une ampleur considérable. « Ces travaux, qui nécessitent des investissements importants, doivent être réalisés avec le niveau de qualité requis », insiste Julien Collet. Le gendarme du nucléaire a exprimé, à plusieurs reprises, ses inquiétudes quant à la capacité d’EDF d’assurer ces chantiers colossaux, alors que l’entreprise fait face à des difficultés économiques importantes.

Le quatrième arrêt décennal du réacteur numéro un de Tricastin, en 2019, a par exemple mobilisé près de 5 000 intervenants pendant six mois. L’ASN a d’ailleurs depuis demandé à EDF de rendre compte chaque année des actions mises en œuvre pour respecter les prescriptions et leurs échéances, ainsi que de sa capacité industrielle et de celle des intervenants extérieurs à réaliser dans les délais les modifications des installations. L’entreprise, qui reconnaît que ce volume de travaux est « sans précédent », estime que leur réalisation « conduira à des améliorations significatives en matière de sûreté ». « Un travail important a été réalisé avec tous nos partenaires industriels pour leur donner de la visibilité sur la charge et les besoins en compétences », précise EDF.

Les opposants au nucléaire appellent, de leur côté, à une fermeture des centrales les plus anciennes. « L’ASN publie ses prescriptions génériques un mois seulement après la clôture de la consultation publique, a réagi l’ONG Greenpeace. Ce délai très court confirme que cette consultation était de pure forme. Des demandes spécifiques visant à améliorer la sécurité et la sûreté des réacteurs, formulées par des ONG ou des experts indépendants, n’ont pas été prises en compte. » « Par cet avis, l’ASN entérine le fait accompli d’EDF, dénonce aussi Charlotte Mijeon, porte-parole du réseau Sortir du nucléaire. Les exigences de sûreté sont tirées vers le bas pour s’adapter aux capacités industrielles d’EDF. Et l’ASN a accepté le principe d’un phasage des travaux ; certains seront réalisés alors que les réacteurs auront 47 ou 48 ans. L’échéance des quarante ans ne veut plus rien dire ! »

Entretien avec le physicien Bernard Laponche : Article réservé à nos abonnés Nucléaire : « L’état du parc français est préoccupant »

Aujourd’hui, 70 % de l’électricité est d’origine nucléaire et la France entend ramener cette part à 50 % à l’horizon 2035. L’Etat a déjà fait arrêter courant 2020 les deux réacteurs de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin). La France doit théoriquement en fermer douze supplémentaires pour tenir son objectif.

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