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Récit

« Il faut un véritable dispositif national de soutien psychologique post-Covid »

LES SOIGNANTS FACE AU CORONAVIRUS, épisode 52. Le pédopsychiatre Noël Pommepuy préside la commission médicale de l'établissement de Ville-Evrard en Seine-Saint-Denis. Alors que les autorités planchent sur un plan de « soutien psychologique » post-Covid, il prévient : « Un numéro d'écoute téléphonique ne saurait suffire ».

Le Dr No�ël Pommepuy est pédopsychiatre en Seine-Saint-Denis
Le Dr Noël Pommepuy est pédopsychiatre en Seine-Saint-Denis (Dessin Kim Roselier pour 'Les Echos')

Par Elsa Freyssenet

Publié le 1 déc. 2020 à 12:13Mis à jour le 1 déc. 2020 à 15:14

« Il y a quelques semaines, il y a eu une alerte sur une augmentation du nombre de tentatives de suicides des adolescents. Les autorités se sont inquiétées et, après enquête, ces tentatives sont en nombre équivalent à l'an dernier, avant l'épidémie de Covid . L'impression d'une hausse, ressentie par les soignants des urgences pédiatriques, venait du fait que, les autres types d'urgences ayant baissé avec le confinement, la psychiatrie prenait une part plus grande dans leur quotidien.

Je donne cet exemple, non pas pour relativiser l'impact du Covid sur la santé mentale et morale des Français, mais pour mettre en lumière un manque : contrairement aux épidémiologistes qui disposent d'indicateurs précis et de modèle mathématiques, nous ne disposons pas, en psychiatrie, de remontées nationales.

Manque de données

Depuis quelque temps, on nous demande d'estimer les besoins de soutien psychologique suite à l'épidémie mais nous nous heurtons à deux obstacles : on manque de chiffres et cette pandémie nous plonge dans un contexte qui n'a pas d'équivalent.

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Suite aux attentats de 2015 , des cellules d'urgence médico-psychologiques avaient pu être déployées rapidement car nous connaissions le syndrome post-traumatique, ses effets et les personnes qui pouvaient en être atteintes.

Cette pandémie, elle, peut avoir des effets sur les anciens malades, les gens qui souffrent du confinement et ceux qui vont prendre de plein fouet la crise économique, ainsi que leurs enfants. Dans quelle ampleur ? Nous l'ignorons totalement.

En revanche, je suis certain d'une chose : le « dispositif de soutien » que le ministre de la Santé doit présenter bientôt ne pourra pas se limiter à ouvrir une ligne d'écoute téléphonique, qui ne sert pas à grand-chose pour les véritables troubles psychologiques ou psychiatriques.

Après la première vague du Covid, nous avons fait face à un accroissement des passages aux urgences en Seine-Saint-Denis. On recensait entre 15 et 20 patients qui attendaient aux urgences psychiatriques qu'une place d'hospitalisation se libère, parfois pendant près de 72 heures.

Muscler la prévention

En ce moment, ils sont une dizaine par jour, ce qui est gérable. Il faut comprendre que nous manquons de structures à même d'accueillir nos patients à la sortie de l'hôpital, ce qui nous place devant un choix terrible : les garder plus longtemps que nécessaire (et priver de place les nouveaux entrants) ou les mettre dehors.

Un véritable dispositif national de soutien psychologique post-Covid devrait commencer par mettre sur pied un observatoire national. Ensuite, il faudrait prévoir un repérage le plus en amont possible afin d'éviter qu'un malaise psychologique ne s'enkyste.

En recréant des équipes de prévention dans les écoles ou les entreprises et en formant les équipes aux premiers secours en santé mentale. Après, il restera le sujet des moyens pour la psychiatrie proprement dite car il n'est plus possible de fermer des lits sans muscler le suivi ambulatoire.

Cela nécessite une volonté politique qui a toujours manqué dans notre domaine. Parce que le réflexe des dirigeants est de se dire : « la psychiatrie c'est compliqué… donc on verra plus tard ». La dernière loi-cadre date de 1992. Dans les vingt dernières années, il y a eu treize rapports sans suite. Olivier Véran a annoncé un soutien aux projets territoriaux de santé mentale : ils auront chacun pilote, c'est déjà ça.

Elsa Freyssenet

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