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Macron « assume » la livraison d’armes à l’Arabie saoudite, malgré la guerre au Yémen

Le chef de l’Etat dit avoir la « garantie » que les armes françaises, actuellement sur un navire saoudien, « n’étaient pas utilisées contre des civils » au Yémen.

Le Monde avec AFP

Publié le 09 mai 2019 à 11h38, modifié le 09 mai 2019 à 21h05

Temps de Lecture 3 min.

Malgré les critiques, la France poursuit sa livraison d’armes à l’Arabie saoudite, engagée dans une guerre au Yémen, et Emmanuel Macron l’« assume » : « L’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont des alliés de la France. Et ce sont des alliés dans la lutte contre le terrorisme. Nous l’assumons totalement », a-t-il affirmé en marge d’un sommet européen, jeudi 9 mai, à Sibiu, en Roumanie. Le chef de l’Etat a toutefois assuré avoir la « garantie » que les armes françaises « n’étaient pas utilisées contre des civils » au Yémen :

« Il y a un comité qui gère ces exports, sous l’autorité du premier ministre, dans lequel les choses d’ailleurs ont été durcies ces dernières années, et où nous demandons la garantie que ces armes ne puissent pas être utilisées contre des civils. Elle a été obtenue. »

Emmanuel Macron réagissait aux recours en urgence, déposés jeudi par l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) et l’ONG Action sécurité éthique républicaines (ASER) au tribunal administratif de Paris, afin d’empêcher le départ du Havre (Seine-Maritime) d’un cargo saoudien chargé d’armes qui pourraient, selon l’ONG, être utilisées dans cette guerre meurtrière.

Livraison de huit canons

« L’Etat français ne peut ignorer que ces armes peuvent servir à commettre des crimes de guerre au Yémen, où plus de 400 000 civils sont potentiellement sous le feu », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) l’avocat de l’ACAT, Joseph Breham. Plusieurs autres organisations — comme Human Rights Watch, Amnesty International ou l’Observatoire des armements — sont également vent debout contre ces ventes. Jeudi, une centaine de personnes étaient rassemblées au port du Havre, à l’appel de la Ligue des droits de l’homme et du Mouvement de la paix, pour dénoncer ces livraisons qui contribuent, selon eux, au « carnage en cours au Yémen ». « Interdire les ventes d’armes aux pays en guerre » ou « Au Yémen, un enfant est tué toutes les cinq minutes », pouvait-on lire sur leurs pancartes.

Si le président français n’a pas précisé les armes qui devaient être chargées au Havre, le site d’investigation Disclose a avancé que le navire devait prendre livraison de « huit canons de type Caesar » que l’Arabie saoudite pourrait utiliser dans la guerre qu’elle livre au Yémen aux rebelles houthistes, minorité chiite soutenue par l’Iran, grand rival de Riyad. Paris a invariablement affirmé que ces armements ne sont utilisés que de manière défensive et pas sur la ligne de front.

Mais, selon une note de la direction du renseignement militaire (DRM), révélée par Disclose mi-avril, 48 canons Caesar produits par l’industriel français Nexter « appuient les troupes loyalistes, épaulées par les forces armées saoudiennes, dans leur progression en territoire yéménite ». Une carte de la DRM estime que « 436 370 personnes » sont « potentiellement concernées par de possibles frappes d’artillerie », dont celles des canons français. « Il ne suffit pas de dire j’ai des garanties, il faut nous les montrer. De même, nous aimerions qu’on nous explique clairement, nettement, comment l’Arabie saoudite lutte contre le terrorisme au Yémen », a réagi Aymeric Elluin, d’Amnesty International France.

« Une des plus graves crises humanitaires »

L’ACAT conteste la décision de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) d’autoriser le cargo Bahri Yanbu, battant pavillon saoudien, « à procéder à un chargement, exportation et transfert au sens de l’article 6 du traité sur le commerce des armes, de matériels de guerre et matériels assimilés, dans le port du Havre, à destination finale de Djeddah en Arabie saoudite ».

Ce traité de l’Organisation des Nations unies, entré en vigueur en 2014, vise à réguler le commerce des armes dans le monde. Son article 6 porte sur les interdictions de transfert d’armes. Il dispose notamment qu’« aucun Etat partie ne doit autoriser le transfert d’armes classiques (…) s’il a connaissance, au moment où l’autorisation est demandée, que ces armes ou ces biens pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des conventions de Genève de 1949, des attaques dirigées contre des civils ou des biens de caractère civil et protégés comme tels, ou d’autres crimes de guerre tels que définis par des accords internationaux auxquels il est partie ».

Emmanuel Macron a promis de s’engager « davantage », aux côtés des Nations unies, « dans la résolution du conflit au Yémen », « l’une des plus graves crises humanitaires que nous ayons aujourd’hui à affronter ». Riyad a pris la tête en 2015 d’une coalition militaire comprenant les Emirats arabes unis pour soutenir le président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi contre les rebelles houthistes, qui ont pris le contrôle de vastes territoires. Ce conflit a entraîné la mort de dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux civils, selon diverses organisations humanitaires. Environ 3,3 millions de personnes sont toujours déplacées et 24,1 millions, soit plus des deux tiers de la population, ont besoin d’assistance, selon l’ONU.

Le Monde avec AFP

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