Covid-19 : ces restaurants qui ont rouvert malgré les menaces de sanction

Plusieurs restaurants ont ouvert ce lundi midi, souvent en extérieur, afin de protester contre les restrictions sanitaires. Plus tôt, le gouvernement avait prévenu qu’ils risquaient gros.

 Stéphane Turillon, qui avait appelé les restaurateurs à ouvrir ce lundi 1er février, a lui-même servi des dizaines de clients à l’extérieur de son restaurant.
Stéphane Turillon, qui avait appelé les restaurateurs à ouvrir ce lundi 1er février, a lui-même servi des dizaines de clients à l’extérieur de son restaurant. AFP/Sébastien Bozon

    Le service n'est pas encore terminé quand on l'appelle. « C'est encore le coup de feu », explique à l'autre bout du fil Julien Achard, le patron du Pescador à l'Isle-sur-la-Sorgue, dans le Vaucluse. Ce lundi, comme il l'avait annoncé, il a rallumé les fourneaux de son restaurant et a servi les 70 clients qui avaient réservé, « et les quelques-uns qui sont venus juste pour boire un verre ».

    À la tête du mouvement « Les Ultras essentiels », qui défend les établissements de restauration fermés à cause du Covid-19, Julien Achard n'est pas le seul en France à avoir ouvert. Dans une vidéo partagée des milliers de fois, Stéphane Turillon, le patron d'un restaurant dans le Doubs, avait appelé ses collègues à ouvrir leurs restaurants pour exprimer leur ras-le-bol face à leur fermeture contrainte. Un appel non relayé par les organisations professionnelles, celles-ci recommandant même à leurs adhérents de ne pas y prendre part.

    À l'initiative de l'appel, Stéphane Turillon a donc servi une centaine de clients, devant son restaurant, debout sous des tentes, et non pas à l'intérieur. « On veut engager un dialogue avec l'Etat, c'est pas en fermant tout qu'on va combattre cette pandémie. Moi, je demande juste mon droit de travailler », explique le patron de « La Source Bleue », à Cusance.

    Des restos ouverts ou à moitié ouverts

    C'est à l'extérieur, aussi, que Julien Achard a servi ses clients. Face aux gendarmes, stationnés devant. « Le masque était porté dès qu'on ne consommait pas », se défend le chef d'entreprise. Comme d'autres restaurateurs, il avait déposé une déclaration de manifestation auprès de la préfecture afin, espère-t-il, de se prémunir contre toute sanction.

    Si tout s'est bien passé chez lui, ce n'est pas le cas partout. « Des confrères m'ont dit que certains Gilets jaunes sont venus et ont voulu s'asseoir à table pour faire parler d'eux », explique Julien Achard. Beaucoup ne voulaient pas être à l'origine des mêmes images qu'à Nice où le patron du « Poppies » avait ouvert son établissement, mercredi dernier, comme si de rien n'était, sans distanciation ni masque.

    Dans son jardin à Wirwignes (Nord), où Claude Quétu a garé son bus impérial qui fait office de restaurant, il y avait aussi du monde ce midi. « J'ai fait une soixantaine de couverts », assure le patron du Red Bus, « heureux » de revoir de « la vie ». Une fois les gendarmes et les journalistes partis, « plusieurs sont montés dans le bus, à l'étage, pour manger », explique le restaurateur. Et le patron de raconter : « Avant, je les ai tous prévenus qu'ils risquaient 135 euros d'amende chacun et je leur ai dit ce que moi je risquais. »

    Difficile de savoir combien de restaurants ont effectivement ouvert. Sur le groupe Facebook « Mon restaurant ouvre le 1er février », qui comptait presque 30 000 membres ce lundi, plusieurs internautes postent des photos de restaurants ouverts ou à moitié ouvert avec seulement un comptoir à l'extérieur, sans table ni chaise. Reste à voir si cela reste considéré comme de la vente à emporter, légale et répandue, ou comme la véritable ouverture du restaurant, interdite.

    Le gouvernement menace

    Plus tôt dans la matinée, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, avait prévenu les restaurateurs : « Tous ceux qui restent ouverts seront suspendus pendant un mois d'accès au fonds de solidarité et si jamais il y a récidive, ils n'y ont plus accès du tout », a-t-il dit sur RTL. Et le ministre d'ajouter : « Je ne veux pas que ça se répande, que ça devienne soit une habitude, soit une façon de braver l'interdit. » Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, avait plus tôt justifié ces sanctions « financières » contre la « très petite minorité des restaurateurs qui déciderait d'ouvrir alors même qu'ils sont fermés administrativement ».

    Des menaces de l'exécutif qui ont refroidi Philippe De Baila, le patron de l'Espace Zola 229, à Villeurbanne (Rhône). Le restaurateur a tout simplement renoncé à servir, malgré les nombreuses réservations. « Il y avait plus de journalistes et de policiers que de clients. Il y avait une forte pression, décrit-il. Même le sous-préfet était venu en personne ! » Le restaurateur, satisfait que « le message soit passé », explique : « On espérait de la tolérance, mais après l'intervention de Bruno Le Maire, ce matin, on a compris qu'il y en aurait pas, et que ça risquait de dégénérer. »

    Dans le Vaucluse, Julien Achard est satisfait de son opération. « On est contents car on a montré qu'on pouvait servir tout en respectant le protocole sanitaire », explique-t-il. Lors des dernières annonces sur le sujet, il n'était pas prévu de réouverture avant, au plus tôt, la mi-février. Mais avec le regain de l'épidémie, et la crainte autour des variants plus contagieux, les restaurants risquent de devoir attendre encore un peu plus longtemps.