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La voiture électrique n'est pas « écologique »

Le jury de déontologie publicitaire épingle l'Autolib' à Paris, la Bluely à Lyon et la Zoé Renault, estimant qu'elles ne peuvent pas être qualifiées de « propres ».

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Publié le 26 juin 2014 à 11h46, modifié le 26 juin 2014 à 17h44

Temps de Lecture 5 min.

Le service Autolib' propose une

La voiture électrique ne peut pas être considérée comme « écologique » ni « propre ». Telle est la conclusion de trois avis publiés par le jury de déontologie publicitaire (JDP), jeudi 26 juin, concernant des publicités pour deux véhicules en libre-service du groupe Bolloré, Autolib' à Paris et Bluely à Lyon, ainsi que la voiture électrique Zoé de Renault.

Le JDP, une instance de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), avait été saisi le 15 avril par l'association Observatoire du nucléaire contre plusieurs pages du site Internet d'Autolib' qui la qualifient « d'écologique » et de « propre » et contre un encart publicitaire présentant Bluely comme « très pratique, écologique et économique ».

La Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut) avait de son côté déposé une plainte, le 18 mars, contre une publicité pour la Zoé titrée « Pour lutter contre la pollution, roulez en voiture », qui précisait « Renault Zoé : 100 % électrique, 0 % d'émissions. »

« ÉLÉMENT DE RELATIVISATION OU DE COMPARAISON »

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« Le jury constate que la publicité litigieuse fait état du caractère écologique du service promu, sans le moindre élément de relativisation ou de comparaison, indiquent les avis concernant les deux voitures en libre-service. Or, l'utilisation de ce service induit nécessairement certains effets négatifs sur l'environnement, notamment les pièces d'usure des véhicules utilisés et l'électricité nécessaire à leur rechargement, dont il n'est pas établi qu'elle serait intégralement issue de sources renouvelables. »

L'avis du JDP sur la Zoé de Renault est, lui, plus modéré : il estime que « la publicité n'induit nullement l'idée que les véhicules électriques n'auraient aucun impact négatif sur l'environnement » puisqu'il est précisé – toutefois en petits caractères après l'astérisque – que l'absence de CO2 se réfère à l'utilisation du véhicule (hors usure) et non à l'ensemble de son cycle de vie ou à la production de l'électricité nécessaire à son rechargement.

Le JDP regrette toutefois que « la supériorité alléguée des véhicules électriques sur les véhicules à moteur thermique en termes d'incidence environnementale est formulée dans des termes très généraux et ne s'accompagne d'aucune précision ». Et d'ajouter : « La publicité en cause incite explicitement les consommateurs à rouler en voiture électrique pour réduire la pollution atmosphérique, alors qu'il existe de nombreux autres moyens de locomotion dont il est communément admis qu'ils sont moins nocifs pour l'environnement, comme les transports collectifs ou le vélo. »

« TOUT VÉHICULE A UN IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT »

« Ces publicités doivent être pondérées, relativisées, selon Stéphane Martin, directeur général de l'ARPP, appliquant la Recommandation développement durable de son Autorité. Tout véhicule a un impact sur l'environnement, lors de sa construction comme de son cycle de vie. On ne peut pas qualifier la voiture électrique de propre mais on peut avancer qu'elle contribue au développement durable ou qu'elle est plus propre que les voitures thermiques, à condition d'en apporter la preuve. »

L'Observatoire du nucléaire pointe tout particulièrement l'électricité d'origine nucléaire (à 75 % en France) qui sert à recharger les batteries, et le lithium, qui sert à les fabriquer et dont l'exploitation peut polluer l'environnement. « Il y a une folie furieuse autour de la voiture électrique, dénonce Stéphane Lhomme, directeur de l'Observatoire du nucléaire. Certes, la voiture électrique ne pollue pas quand elle circule, mais elle pollue avant et après, et surtout elle délocalise la pollution autour des mines d'uranium et de lithium, des centrales nucléaires, des sites de stockage de déchets radioactifs. » A la place, cet ancien porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire appelle à développer davantage les transports en commun et le covoiturage.

NEUF VOITURES ÉLECTRIQUES ÉPINGLÉES

Plusieurs voitures électriques ont été épinglées par le jury de déontologie publicitaire.

C'est la neuvième fois que le JDP épingle des publicités pour des voitures électriques. Depuis l'an dernier, ont été visées la C-Zéro de Citroën, l'Opel Ampera, la Nissan Leaf, la I-Miev de Mitsubishi, la Bluecar de Bolloré (la voiture utilisée pour les services Autolib', Bluely et BlueCub), et la BlueCub (la voiture en libre service à Bordeaux), également de Bolloré.

Si les avis du JDP ne sont pas contraignants, ils s'avèrent le plus souvent suivis d'effet dans la mesure où les entreprises préfèrent donner une image de bon élève à leurs clients et aux collectivités locales. Tous les constructeurs ont ainsi modifié leur publicité, à l'exception de Bolloré.

« S'il faut enlever un mot, on le fera. Mais c'est un non-sujet, rétorque Julien Marin, directeur de la communication de Bolloré. Les villes du monde entier s'intéressent à l'Autolib' comme véhicule non polluant. » Et d'ajouter : « Nous utilisons des batteries lithium métal polymère, qui ne risquent pas de s'inflammer, contrairement au lithium-ion. A Lyon, nous avons en outre un accord avec la Compagnie nationale du Rhône, qui nous fournit une électricité 100 % hydraulique. »

RÉDUIRE LA POLLUTION LOCALE

En décembre, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) avait publié un rapport comparant véhicules électriques et véhicules thermiques. Si elle sort de l'usine en ayant émis plus de CO2 (du fait principalement de l'extraction des métaux qui composent la batterie), la voiture électrique rattrape assez vite son retard grâce à une électricité nucléaire peu ou pas émettrice de gaz à effet de serre (mais qui génère des déchets radioactifs). Pour un cycle de vie moyen estimé à 150 000 kilomètres, elle émettra au total environ 10 tonnes de CO2, contre 22 tonnes pour une voiture diesel et environ 27 t pour une voiture à essence, selon le scénario de référence de l'étude.

Des conclusions très différentes en Allemagne, où l'électricité vient actuellement à 44 % du charbon très émetteur de gaz à effet de serre. Les émissions y seront alors plus importantes qu'une voiture conventionnelle jusqu'à 100 000 kilomètres, équivalente au-delà du 100 000e kilomètre et légèrement inférieure en fin de vie, à 150 000 kilomètres. La voiture électrique « reste indéniablement une bonne arme pour limiter la pollution locale », des villes notamment, estimait Maxime Pasquier, un des responsables de l'étude à l'Ademe, interrogé par l'AFP.

Le projet de loi sur la transition énergétique, présenté par la ministre de l'écologie, Ségolène Royal, en conseil des ministres le 18 juin, fait la part belle aux voitures électriques. Il prévoit 7 millions de points de recharge en France d'ici à 2030. Le bonus pour l'achat d'un véhicule électrique sera pérennisé et même majoré pour atteindre jusqu'à 10 000 euros lorsqu'il s'accompagne de la mise au rebut d'un véhicule diesel.

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