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Essais nucléaires en Polynésie: le rapport de l'Inserm assimilé à du «négationnisme»

L'atoll de Mururoa, en Polynésie française, où la France a conduit 138 essais nucléaires jusqu'en 1996.
L'atoll de Mururoa, en Polynésie française, où la France a conduit 138 essais nucléaires jusqu'en 1996. GREGORY BOISSY / AFP

Dans un document à paraître mercredi, dix experts jugent inconcluants les liens entre l'exposition aux rayonnements ionisants et des pathologies comme le cancer de la thyroïde ou les hémopathies malignes.

L'une des principales associations antinucléaires de Polynésie française, l'association 193, a regretté mardi 23 février la publication d'un rapport de l'Inserm sur les conséquences sanitaires des essais nucléaires, l'assimilant à du «négationnisme». Dans ce rapport, à paraître mercredi, dix experts réunis par l'Inserm estiment que les résultats des études menées en Polynésie française «sont insuffisants pour conclure de façon solide sur les liens entre l'exposition aux rayonnements ionisants issus des retombées des essais nucléaires atmosphériques en Polynésie française et l'occurrence» de pathologies comme le cancer de la thyroïde ou les hémopathies malignes.

«Ce rapport n'apporte rien de nouveau, c'est la continuité d'une négation de la réalité. 193 essais nucléaires, c'est l'équivalent de 800 bombes d'Hiroshima : dire qu'il n'y a pas eu d'effets, c'est du négationnisme», a déclaré le père Auguste Uebe-Carlson, président de 193. Cette association milite notamment pour une meilleure indemnisation des victimes des essais. Au-delà des effets sanitaires des essais nucléaires, l'association 193 s'inquiète d'une réinterprétation de l'Histoire, par exemple au sein du Centre de Mémoire, qui devrait voir le jour à Tahiti après un engagement du Président François Hollande. «Le Centre de mémoire va devenir un lieu où on va retrouver ce genre d'affirmation sur les essais propres, ça va être le lieu d'une seule parole», s'inquiète le père Uebe-Carlson.

Compte tenu de tous les mensonges qu'il y a eu, on peut se demander si ces conclusions ne sont pas un nouveau mensonge, même si ce sont des scientifiques de l'Inserm et non l'État. »

Moetai Brotherson, député et cadre du parti indépendantiste polynésien

Le rapport de l'Inserm a réuni 1.200 études portant sur la Polynésie, mais aussi sur d'autres lieux d'essais nucléaires. «Parmi les documents étudiés, il y en a quelques-uns qui sont issus des années folles où tout ce qui touchait au nucléaire était entièrement contrôlé par l'armée», a regretté le député Moetai Brotherson, cadre du parti indépendantiste polynésien. L'historien Jean-Marc Regnault regrette «des régressions sur l'ouverture des archives militaires» qui nourrissent les «doutes» des militants sur la sincérité de l'étude. «Compte tenu de tous les mensonges qu'il y a eu, on peut se demander si ces conclusions ne sont pas un nouveau mensonge, même si ce sont des scientifiques de l'Inserm et non l'État».

Jean-Marc Regnault rappelle que d'autres études scientifiques, comme celles de la CRIIRAD (Commission de Recherche et d'Information Indépendantes sur la Radioactivité), sont arrivées à des conclusions différentes à partir des mêmes documents et que les autorités de l'État, comme François Hollande, ont aussi reconnu les conséquences sanitaires des essais nucléaires. Les indépendantistes polynésiens et les associations antinucléaires mènent un combat commun, pour une meilleure indemnisation des victimes de maladies radio induites. Ils craignent que ce rapport soit un frein aux demandes d'indemnisation.

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157 commentaires
  • Etonnant

    le

    C'est comme Chernobyl, le nuage est resté de l'autre côté de la frontière...

  • domnin Courbons

    le

    Pas besoin de d'étude ou de rapport. Il faut indemniser ces gens. C'est l'intérêt majeur de la France en Polynésie.

  • Paul Meirion

    le

    «sont insuffisants pour conclure»
    Il me semble que c'est du français et que ça signifie: «sont insuffisants pour conclure»
    Quels sont les éléments manquants, s'ils existent?

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