
En ce 4 mars 2019, Gao Fu est un scientifique encore plein de certitudes. « Il y aura à l’avenir d’autres virus comparables au SRAS [syndrome respiratoire aigu sévère, en 2003], mais il n’y aura plus d’épidémie comparable », promet le directeur général du centre chinois de contrôle et de prévention des maladies, au cours d’une réunion organisée à Pékin, la veille de l’ouverture des deux sessions du Parlement.
Depuis 2004, un système informatisé de reporting des maladies contagieuses permet à chaque hôpital d’informer Pékin en temps réel de l’apparition de cas douteux, et d’obtenir une expertise en quelques heures. « Nous avons construit un très bon réseau de détection des maladies contagieuses. Si des virus viennent, on les bloquera. » D’ailleurs, le système a déjà fait ses preuves. « Regardez le MERS [un coronavirus apparu au Moyen Orient en 2012], un touriste coréen venu en Chine en était porteur. On l’a repéré et isolé. En Corée du Sud, il y a eu 186 malades et 32 morts », explique-t-il.
Pourtant, le 30 décembre 2019, lorsque, comme tous les soirs avant d’aller se coucher, Gao Fu surfe sur quelques forums spécialisés pour vérifier que la situation est sous contrôle, ce médecin, à la tête d’un organisme de 2 000 personnes, a un choc. A Wuhan, des médecins commencent à discuter d’une pneumonie d’origine inconnue. Il appelle immédiatement la commission de la santé de Wuhan, qui lui confirme les faits. Plus de trois personnes sont concernées. L’information aurait dû remonter à Pékin, mais c’est presque par inadvertance que Gao Fu l’a apprise. Le système national d’alerte n’a pas fonctionné, ouvrant la voie à l’une des plus graves épidémies de l’histoire contemporaine.
Il vous reste 79.64% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.